Cette exposition présente, pour la première fois au public français, les plus belles pièces de la collection de joyaux et d’objets précieux indiens constituée durant de longues années par le Cheikh Nasser al-Sabah. Elle témoigne du sens aigu de la beauté et de l’objet rare, de l’extrême raffinement et de l’opulence qui ont ébloui les visiteurs des cours princières d’Inde à l’époque de l’Empire moghol. L’art de la joaillerie Mogholes illustre avec éclat la rencontre féconde entre la civilisation aristocratique apportée d’Asie centrale par les descendants de Tamerlan et l’Inde fabuleuse des grandes routes commerciales, où artistes et artisans exerçaient leurs talents sous la protection de riches mécènes éclairés...
Donner au grand public une image la plus complète possible de ces joyaux classiques indiens, tel est le but de cette exposition exceptionnelle. C'est en effet dans le sous-continent indien que l'art de la joaillerie a connu son plus bel essor, atteignant son apogée à l'époque des Grands Moghols, empereurs fastueux qui régnèrent sur l’Inde à partir de 1526 et parvinrent à se maintenir sur leur trône jusqu’en 1857. La collection al-Sabah est actuellement la plus importante collection de joyaux moghols au monde. L’exposition est organisée en treize sections, consacrées à des thèmes artistiques et techniques précis. S'offrent ainsi au regard plus de trois cents objets d'une fantaisie et d'une inventivité prodigieuses (bagues, colliers, boucles d'oreilles, bracelets, ornements de turban, dagues, fioles et boîtes, … ), toutes travaillées avec une grande finesse. Elle est propre à susciter chez les visiteurs une réaction de même nature que celle de Sir Thomas Roe, premier ambassadeur anglais à la cour du Grand Moghol, qui, faisant allusion aux joyaux de l’empereur Jahangir, décrivit ce dernier comme 'le trésor du monde' : 'En bijoux (qui est l’une de ses félicités), il est le trésor du monde, achetant tout ce qu’il trouve, et amassant les pierres somptueuses comme s’il préférait les amonceler plutôt que les porter.' (Lettre au prince Charles, futur roi Charles Ier, datée du 30 octobre 1616).
Donner au grand public une image la plus complète possible de ces joyaux class iques indiens, tel est le but de cette exposition exceptionnelle. C'est en effet dans le sous-continent indien que l'art de la joaillerie a connu son plus bel essor, atteignant son apogée à l'époque des Grands Moghols, empereurs fastueux qui régnèrent sur l’Inde à partir de 1526 et parvinrent à se maintenir sur leur trône jusqu’en 1857. La collection al-Sabah est actuellement la plus importante collection de joyaux moghols au monde. L’exposition est organisée en treize sections, consacrées à des thèmes artistiques et techniques précis. S'offrent ainsi au regard plus de trois cents objets d'une fantaisie et d'une inventivité prodigieuses (bagues, colliers, boucles d'oreilles, bracelets, ornements de turban, dagues, fioles et boîtes, … ), toutes travaillées avec une grande finesse. Elle est propre à susciter chez les visiteurs une réaction de même nature que celle de Sir Thomas Roe, premier ambassadeur anglais à la cour du Grand Moghol, qui, faisant allusion aux joyaux de l’empereur Jahangir, décrivit ce dernier comme 'le trésor du monde' : 'En bijoux (qui est l’une de ses félicités), il est le trésor du monde, achetant tout ce qu’il trouve, et amassant les pierres somptueuses comme s’il préférait les amonceler plutôt que les porter.' (Lettre au prince Charles, futur roi Charles Ier, datée du 30 octobre 1616).
Manuscrit miniature du Coran et son coffret en pendentif, manuscrit écrit à l’encre noire sur papier, jade, or, rubis, émeraude et pour le pendentif : or, émail, diamants, rubis, émeraudes, Inde, Deccan ou empire moghol, datation AH 1085 (1674- 1675) pour le manuscrit et vers 1680 pour le pendentif, Koweit,
collection al-Sabah, inv. LNS 373 HS et LNS 2201 J
© the al-Sabah Collection / Bruce M. White
Lieu
Musée du Louvre - Hall Napoléon
Entrées conseillées au musée
- par la pyramide : entrée principale de 9 h à 22 h, accès au hall Napoléon, aux espaces d'accueil, à l'auditorium,
Entrées conseillées aux expositions temporaires
- par le passage Richelieu : entrée de 9 h à 18 h, pour les visiteurs déjà munis d'un titre d'accès, les groupes, les Amis du Louvre, les titulaires des cartes Louvre jeunes, Louvre professionnels, Louvre enseignants, Louvre étudiants partenaires et les spectateurs de l'auditorium munis de leurs billets.
- par la galerie du Carrousel : accès par le jardin du Carrousel de 9 h à 22 h ou par le 99, rue de Rivoli.
Dates
Du 6 juillet au 4 septembre 2006
Horaires
Ouvert tous les jours, sauf le mardi, de 9 h à 18 h et jusqu'à 22 h les mercredi et vendredi
Tarification
Billet spécifique pour l'exposition 'Le Trésor du monde' : 8.50 euros.
Billet jumelé collections permanentes et exposition 'Le Trésor du monde' : 13 euros, 11 euros les mercredi et vendredi à partir de 18 h.
Accès libre pour les moins de 18 ans, les chômeurs, les adhérents des cartes Louvre jeunes, Louvre professionnels, Louvre enseignants, Louvre étudiants partenaires et Amis du Louvre.
Gratuit le premier dimanche de chaque mois et, pour les moins de 26 ans, les vendredi à partir de 18 h (hors exposition 'Le Trésor du monde' ).
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- À l'unité et pour moins de 20 billets
Fnac (0,34 E TTC / min) : 0 892 684 694
TicketNet (0,34 E TTC / min) : 0 892 390 100
Site www.louvre.fr
Dans les magasins Fnac, Carrefour, Leclerc, Continent, Auchan, Extrapole, Hyper-média, Le Bon Marché, Le Printemps, Galeries Lafayette, BHV, Virgin Megastore. Aux gares Transilien / SNCF en Ile-de-France.
- À partir de 20 billets :
Boutique Musée & Compagnie tél. 01.40.13.49.13
Les billets achetés à l'avance ont une date de validité illimitée. Ils permettent un accès direct par le passage Richelieu ou par la galerie du Carrousel.
Renseignements : 01.40.20.53.17 (banque d'information sous la pyramide)
Site www.louvre.fr
Préface
par Cheikh Nasser Sabah al-Ahmad al-Sabah
Ma passion pour l’histoire de l’art est née dans les années 1960, alors que je faisais mes études à Jérusalem. J’étais entre autres fasciné par les monuments de cette ville ancienne, en particulier les édifices musulmans qui couvrent une période allant du VIIe au XXe siècle. Ce legs de l’histoire que je considère comme inhérent à ma culture m’emplissait de fierté et fit germer en moi l’envie d’en connaître davantage sur les réalisations artistiques de l’Islam. Cette prise de conscience se concrétisa sous la forme d’une collection d’objets d’art islamique que je commençai au milieu des années 1970. Dès le début, j’éprouvai une envie impérieuse de faire partager mon admiration pour ces témoignages émouvants du passé, une passion que partageait également mon épouse, Cheikha Hussah Sabah al-Salim al-Sabah, qui prit la direction de notre musée. Nos efforts furent véritablement couronnées de succès lorsque cette collection intégra le musée national du Koweit en février 1983. Exposée jusqu’à l’invasion irakienne, en 1990, cette vaste collection éminemment complète n’a cessé de croître au fil du temps, jusqu’à nos jours.
Etant donné ma fascination pour les arts de la joaillerie, les joyaux islamiques et tout particulièrement indiens constituèrent, dès le début, l’un des points forts de notre collection. Tandis que celle-ci devenait plus importante, il en alla bien évidemment de même pour mes compétences, si bien que mon intérêt se porta sur des objets de plus en plus raffinés. La recherche de joyaux indiens anciens pose toujours un problème immense car, contrairement aux autres domaines artistiques, très peu de collections ou de publications peuvent servir de référence. Il faut dès lors se fier à sa propre expérience et à son sens du beau, de l’objet rare et de qualité. Peu à peu, toutefois, et particulièrement ces dernières années, la collection prit une telle ampleur que l’étude de chaque pièce nous permit d’établir des liens de parenté et d’apporter un nouvel éclairage sur d’autres œuvres. Cela nous mit dans la situation privilégiée de pouvoir acquérir des objets avec un oeil averti, ce malgré un climat de compétition de plus en plus tendu. En fait, il était tout naturel pour moi, qui suis natif de la région du Golfe persique, d’éprouver des affinités avec l’Inde et son art, en raison d’une longue familiarité avec des objets provenant du sous-continent. En effet, les habitants du Golfe sont, de longue date, familiers avec ce pays. Cette relation naturelle très étroite résulte, entre autres, du commerce maritime qui remonte à des temps très anciens et se poursuit aujourd’hui. Par ailleurs, les perles du Golfe, universellement reconnues comme étant les plus belles, renforcèrent ce rapport spécifique avec les bijoux car, bien évidemment, la destination de prédilection fut toujours l’Inde. En définitive, toutefois, c’est l’art de la joaillerie indienne qui m’a subjugué et poussé à en explorer toutes les dimensions. L’acquisition des plus belles œuvres empêche qu’elles ne disparaissent et tombent dans l’oubli, et permet à d’autres de les étudier. J’ai la conviction intime que leur présentation au grand public, par l’entremise d’expositions et de publications, apportera des éclairages encore insoupçonnés à de nombreux chercheurs et étudiants, et ouvrira de nouveaux horizons à un grand nombre de personnes de par le monde. Il me semble que nous rendons ainsi un hommage bien mérité à la mémoire de ces artistes, le plus souvent inconnus, qui ont contribué, par leur travail, à faire partager ces chefs-d’œuvre au plus grand nombre.
Constituée à partir du milieu des années 1970 par Cheikh Nasser et son épouse Cheikha Hussah al-Sabah, la collection al-Sabah est en dépôt au Musée national du Koweit depuis 1983. Emportée à Bagdad comme butin de guerre par les troupes de Saddam Hussein après l’invasion du Koweit en 1990 puis restituée, la collection a cependant perdu 59 œuvres lors de ces événements. Avec passion et rigueur, Cheikh Nasser a réuni une collection qu’il a voulue représentative de l’ampleur et de la diversité de l’art islamique. Si elle est effectivement une des collections les plus complètes et remarquables d’art islamique au monde, la collection al-Sabah est surtout connue pour abriter l’ensemble le plus exceptionnel de joyaux et objets précieux indiens. L’essentiel de ces œuvres de joaillerie a été produit avant la fin du XVIIe siècle, reflétant ainsi la façon dont Cheikh Nasser collectionne : recherchant naturellement les plus belles pièces, il porte une attention particulière à celles qui contribuent significativement à dresser le tableau de la production artistique de la région à cette période. L’ancienneté et la qualité incomparable des œuvres de la collection témoignent d’une réalité : les œuvres les plus belles et les plus inventives ont souvent été produites durant la période d’apogée de l’empire moghol, sous les règnes des Grands Moghols Akbar, Jahangir, Shah Jahan et Aurangzeb (soit entre 1556 et 1707).
Constituée à partir du milieu des années 1970 par Cheikh Nasser et son épouse Cheikha Hussah al-Sabah, la collection al-Sabah est en dépôt au Musée national du Koweit depuis 1983. Emportée à Bagdad comme butin de guerre par les troupes de Saddam Hussein après l’invasion du Koweit en 1990 puis restituée, la collection a cependant perdu 59 œuvres lors de ces événements. Avec passion et rigueur, Cheikh Nasser a réuni une collection qu’il a voulue représentative de l’ampleur et de la diversité de l’art islamique. Si elle est effectivement une des collections les plus complètes et remarquables d’art islamique au monde, la collection al-Sabah est surtout connue pour abriter l’ensemble le plus exceptionnel de joyaux et objets précieux indiens. L’essentiel de ces œuvres de joaillerie a été produit avant la fin du XVIIe siècle, reflétant ainsi la façon dont Cheikh Nasser collectionne : Constituée à partir du milieu des années 1970 par Cheikh Nasser et son épouse Cheikha Hussah al-Sabah, la collection al-Sabah est en dépôt au Musée national du Koweit depuis 1983. Emportée à Bagdad comme butin de guerre par les troupes de Saddam Hussein après l’invasion du Koweit en 1990 puis restituée, la collection a cependant perdu 59 œuvres lors de ces événements. Avec passion et rigueur, Cheikh Nasser a réuni une collection qu’il a voulue représentative de l’ampleur et de la diversité de l’art islamique. Si elle est effectivement une des collections les plus complètes et remarquables d’art islamique au monde, la collection al-Sabah est surtout connue pour abriter l’ensemble le plus exceptionnel de joyaux et objets précieux indiens. L’essentiel de ces œuvres de joaillerie a été produit avant la fin du XVIIe siècle, reflétant ainsi la façon dont Cheikh Nasser collectionne : recherchant naturellement les plus belles pièces, il porte une attention particulière à celles qui contribuent significativement à dresser le tableau de la production artistique de la région à cette période. L’ancienneté et la qualité incomparable des œuvres de la collection témoignent d’une réalité : les œuvres les plus belles et les plus inventives ont Constituée à partir du milieu des années 1970 par Cheikh Nasser et son épouse Cheikha Hussah al-Sabah, la collection al-Sabah est en dépôt au Musée national du Koweit depuis 1983. Emportée à Bagdad comme butin de guerre par les troupes de Saddam Hussein après l’invasion du Koweit en 1990 puis restituée, la collection a cependant perdu 59 œuvres lors de ces événements. Avec passion et rigueur, Cheikh Nasser a réuni une collection qu’il a voulue représentative de l’ampleur et de la diversité de l’art islamique. Si elle est effectivement une des collections les plus complètes et remarquables d’art islamique au monde, la collection al-Sabah est surtout connue pour abriter l’ensemble le plus exceptionnel de joyaux et objets précieux indiens. L’essentiel de ces œuvres de joaillerie a été produit avant la fin du XVIIe siècle, reflétant ainsi la façon dont Cheikh Nasser collectionne : recherchant naturellement les plus belles pièces, il porte une attention particulière à celles qui contribuent significativement à dresser le tableau de la production artistique de la région à cette période. L’ancienneté et la qualité incomparable des œuvres de la collection témoignent d’une réalité : les œuvres les plus belles et les plus inventives ont souvent été produites durant la période
Constituée à partir du milieu des années 1970 par Cheikh Nasser et son épouse Cheikha Hussah al-Sabah, la collection al-Sabah est en dépôt au Musée national du Koweit depuis 1983. Emportée à Bagdad comme butin de guerre par les troupes de Saddam Hussein après l’invasion du Koweit en 1990 puis restituée, la collection a cependant perdu 59 œuvres lors de ces événements. Avec passion et rigueur, Cheikh Nasser a réuni une collection qu’il a voulue représentative de l’ampleur et de la diversité de l’art islamique. Si elle est effectivement une des collections les plus complètes et remarquables d’art islamique au monde, la collection al-Sabah est surtout connue pour abriter l’ensemble le plus exceptionnel de joyaux et objets précieux indiens. L’essentiel de ces œuvres de joaillerie a été produit avant la fin du XVIIe siècle, reflétant ainsi la façon dont Cheikh Nasser collectionne : recherchant naturellement les plus belles pièces, il porte une attention particulière à celles qui contribuent significativement à dresser le tableau de la production artistique de la région à cette période. L’ancienneté et la qualité incomparable des œuvres de la collection témoignent d’une réalité : les œuvres les plus belles et les plus inventives ont souvent été produites durant la période d’apogée de l’empire moghol, sous les règnes des Grands Moghols Akbar, Jahangir, Shah Jahan et Aurangzeb (soit entre 1556 et 1707).
Avant-propos
par Henri Loyrette, président-directeur du musée du Louvre
La collection exceptionnelle de Cheikh Nasser Sabah al-Ahmad al-Sabah, constituée avec un sens aigu de la beauté, rassemble des pièces rares et majeures de l’Inde Moghole, collectionnées à partir du XVIe siècle par les empereurs et leur entourage. L’art de la joaillerie au temps des Grands Moghols illustre avec éclat cette rencontre féconde entre l’islam apporté d’Asie centrale par les descendants de Tamerlan et l’Inde fabuleuse des grandes routes commerciales, où artistes et artisans exerçaient leurs talents sous la protection de riches amateurs éclairés. François Bernier, médecin de Dâneshmand Khân et grand ami de Jean de La Fontaine, racontait que tout l’or extrait des mines du Pérou aboutissait en Inde et finissait en sublimes pièces d’orfèvrerie. Près de quatre siècles plus tard, la magie reste intacte, et c’est l’un des aspects les plus fascinants de cette cour moghole, où s’amoncelaient joyaux et pierreries travaillés par les joailliers les plus réputés, que cette merveilleuse collection al-Sabah nous propose de découvrir. Ces chefs-d’oeuvre témoignent d’un raffinement extrême dont on se souvient qu’il avait suscité l’émerveillement de tant de visiteurs des cours princières de passage en Inde, à l’apogée de l’Empire Moghol. Aujourd’hui, c’est aux publics du Louvre que ces joyaux sont dévoilés, dans une très belle exposition que nous sommes heureux, et très reconnaissants à Cheikh Nasser et Cheikha Hussah al-Sabah, de pouvoir accueillir, avant que toutes ces pièces ne retrouvent définitivement leur place au Kuwait National Museum.
Une introduction à la collection et à l’expositionpar Manuel Keene, conservateur de la Collection al-Sabah
Cette exposition présente une sélection des plus anciens et des plus beaux objets de la collection de Cheikh Nasser Sabah al-Ahmad al-Sabah, reconnu comme le principal collectionneur de joaillerie au monde. Depuis le milieu des années 1970, Cheikh Nasser a collectionné, passionnément et avec sérieux, en poursuivant un unique but : constituer une collection, de la plus haute qualité possible, qui soit véritablement représentative de l’ampleur et de la diversité de l’art islamique. Contrairement à n’importe quelle exposition d’envergure de joaillerie indienne qui pourrait être organisée à partir de toute autre collection particulière, l’écrasante majorité des objets a été produite avant la fin du XVIIe siècle. Ce qui reflète bien la façon dont Cheikh Nasser collectionne, au sens où la Collection recherche bien sûr les plus belles pièces mais aussi et surtout celles qui représentent des types auparavant inconnus - c’est-à-dire des pièces qui contribuent significativement à dresser le tableau artistique de la région à cette période. L’ancienneté et la qualité incomparable de l’essentiel de la collection al-Sabah de joaillerie témoignent d’une réalité : les œuvres les plus belles et les plus inventives ont souvent été produites durant la période d’apogée de l’Empire moghol, particulièrement sous les règnes des Grands Moghols Akbar, Jahangir, Shah Jahan et Aurengzeb (soit entre 1556 et 1707). L’importance de cette collection a été universellement reconnue par les savants et les connaisseurs depuis sa présentation au Musée national du Koweit, inaugurée en février 1983, suite à un prêt de long terme à l’Etat du Koweit. Dès les premières étapes de la constitution de sa collection, Cheikh Nasser a montré sa croyance dans l’importance esthétique de la joaillerie en rassemblant des objets de la plus belle qualité, également représentatifs des goûts des classes dirigeantes de l’époque. Son œil très sûr et sa stupéfiante mémoire lui permettent d’apprivoiser un champ riche en matériel mais pour lequel de vastes zones de l’histoire de l’art demandent encore d’être explorées et étudiées dans le détail. Les personnes bien informées dans ce domaine reconnaissent que ce sujet ne peut être correctement étudié que dans la collection al-Sabah. C’est ainsi avec fierté que sont listés ci-après certains des actifs culturels exceptionnels que la collection al-Sabah seulement peut présenter au public et à la communauté scientifique à travers cette exposition et le catalogue qui l’accompagne.
L’âge d’or de la joaillerie indienne
Cette exposition, la première en France à rassembler les œuvres de joaillerie de la collection al-Sabah, est surtout la première exposition d’envergure internationale consacrée aux arts de la joaillerie de la période des Moghols. Les pièces présentées illustrent autant la subtilité artistique, le génie créatif que la finesse technique des artistes indiens des XVIe et XVIIe siècles. Terre naturellement riche en gemmes, le sous-continent indien est également le berceau des connaissances en matière de pierres précieuses. Depuis les temps anciens s’y est en effet développé un ensemble de savoir-faire unique, qui a donné naissance à la gamme des arts de la joaillerie sans doute la plus variée au monde. Outre les commandes à des fins personnelles, les gemmes et les objets précieux étaient privilégiés pour les cadeaux raffinés entre souverains, courtisans et émissaires diplomatiques. Certaines des pièces spectaculaires présentées ici appartenaient d’ailleurs à la succession des empereurs moghols, tandis que bien d’autres objets faisaient la fierté d’une multitude de mécènes princiers. Tous montrent l’éblouissante maîtrise des artistes joailliers indiens, dont les matières premières de prédilection étaient l’or, les rubis, les émeraudes, les diamants et les perles.
Rappels historiques
Au VIIIe siècle de notre ère, les armées musulmanes font d’importantes conquêtes dans la vallée de l’Indus, établissant des protectorats qui évoluent ensuite en principautés. Les incursions annuelles du sultan Mahmud de Ghazna en territoire indien au cours du XIe siècle et la création d’une capitale et d’un centre très cultivé à Lahore témoignent du processus d’enracinement durable du pouvoir et de la culture islamiques dans le sous-continent. Dès lors, une série de dynasties d’origine turque et afghane règne à partir de Delhi sur des territoires de plus en plus vastes. C’est ce sultanat de Delhi qui est conquis en 1526 par le prince Babur, qui se déclare le premier empereur moghol. Son fils Humayun est chassé au bout de dix ans de règne mais reprend le pouvoir quinze ans plus tard. L’empire moghol perdure ensuite officiellement jusqu’à ce que le dernier empereur, Bahadur Shah, soit destitué par les Britanniques en 1857. Essentiellement sous les règnes du fils d’Humayun, Akbar, et de ses deux successeurs, Jahangir, grand amateur de gemmes, et Shah Jahan, constructeur fameux du Taj Mahal, une période de cent années de puissance et de gloire (1556-1657) établit définitivement la renommée des Grands Moghols et ce, jusqu’en Occident, où la magnificence de leur civilisation était devenue légendaire.
Encrier, jade, or, rubis, émeraudes, argent, Inde, probablement empire moghol, milieu du XVIIe siècle, Koweit, collection al-Sabah, inv. LNS 84 HS
© the al-Sabah Collection / Bruce M. White
Organisation de l’exposition
Les pièces ont été réparties en treize sections, souvent représentatives de certaines techniques, seules ou combinées, qui apportent un éclairage sur leurs relations historico-artistiques. Ceci est particulièrement vrai pour les sections 1 à 4 (sertissage des pierres, pierres dures à décor incrusté, relief par martelage de métal précieux et gravure, sur le revers, de joyaux en or) ainsi que les sections 6 et 7 (respectivement l’évolution de l’art de l’émail et l’acier enrichi d’or). La section 5 aborde les techniques de la gravure et de la ciselure de l’or entre les sertis de gemmes qui permirent de créer des dagues et des bijoux particulièrement somptueux et caractéristiques du début de l’ère moghole. Nous avons réservé la section 12 à un groupe de pièces très particulières : les gemmes gravées d’inscriptions royales, essentiellement des spinelles. La section 8, très différente dans sa nature, réunit des œuvres de type variés et dans divers matériaux, qui se distinguent par leurs qualités sculpturales, tandis que les pièces de la section 9 ont été choisies pour représenter les ornements taillés en relief. Ces deux dernières sections comportent l’une comme l’autre des récipients en jade, ce qui signifie qu’il a parfois fallu séparer des pièces similaires pour les placer dans des groupes différents. Les sections 9 et 11 (cette dernière mettant en valeur la forme de certaines gemmes) ont également posé des problèmes de classification puisqu’elles incluent dans les deux cas des émeraudes gravées. Les œuvres pour lesquelles on a voulu valoriser la taille spécifique des gemmes figurent dans la section 10 et, si l’on trouve dans la plupart des sections de l’or serti de gemmes et des objets incrustés d’or, la section 13 leur est entièrement consacrée. Il nous semble inévitable que, dans certains cas, le choix du regroupement soit remis en question, mais nous avons l’intime conviction que la beauté des pièces transcendera un tel problème.
1/ Diversité dans les montures de gemmes
2/ Pierres dures à décor incrusté
3/ Relief par martelage de métal précieux
4/ Joyaux au revers d’or gravé
5/ Gemmes sur fond d’or à motif floral
6/ L’évolution de l’art de l’émail
7/ Acier enrichi d’or
8/ Merveilles sculptées
9/ Ornements taillés en relief
10/ Sertissage de gemmes taillées en relief
11/ Formes remarquables de gemmes
12/ Gemmes gravées d’inscriptions royales
13/ Pièces d’exception
Parcours de l’exposition
par Manuel Keene
1 - Diversité dans la monture des gemmes
La première section met l’accent sur des pièces incarnant des étapes significatives ou des réalisations remarquables dans les montures des gemmes et souligne la technique kundan, développée exclusivement en Inde. Cette technique, qui donne une complète liberté artistique au joaillier, repose sur le travail de l’or pur. Celui-ci est travaillé sous forme de feuilles, est fondu et amalgamé, et rendu malléable à la température ambiante, utilisant seulement la pression manuelle aidée d’un outil pour former des éléments d’or solide pour toute utilisation pratique et artistique. Les autres techniques présentées sont l'emploi de cristaux octaédriques de diamants bruts ; les montures sertis sur rails et talab (sorte de serti invisible) ; les montures "empillées" et les montures ajourées. Ces joyaux - de tailles, de matériaux, et de fonctions très différents - restent toutefois proches les uns des autres par leurs techniques et leurs détails artistiques. Les pièces en or incrustées de gemmes dans un kaléidoscope de formes vont de minuscules ornements personnels jusqu'à une grande dague à poignée de jade blanche incrustée de pierres précieuses, dont la lame est damasquinée d’or.
2 - Pierres dures à décors incrustés
Nous ne connaissons pas d'objets en pierres dures incrustées de métaux précieux antérieurs au XIIe siècle, ce qui est surprenant lorsqu'on tient compte de l'ancienneté de la tradition de la taille des pierres dures et des objets de métal incrustés de métaux précieux, comme l'or et l'argent. L’incrustation des pierres dures s’est particulièrement développée dans le monde islamique, riche de traditions sophistiquées pour la décoration, et il n'est pas surprenant que ce soit en Inde que l'art de l’incrustation de pierres dures ait atteint son point ultime de perfection, étant donné ses traditions prolifiques et légendaires de taille des pierres dures d'une part, et de son répertoire unique et riche dans l'art de la joaillerie d'autre part. Ici encore, c'est la technique kundan (fusion de l'or à la température ambiante) qui a permis aux artistes indiens de donner forme à leurs visions et de transmettre un vaste corpus d'un raffinement sans pareil. Parmi les nombreuses pièces de cette section figurent un ensemble (poignée, quillons et chape d’épée) en ivoire de morse sculpté et incrusté d’or, d’un style jusqu’alors inconnu et de date ancienne (dernier quart du XVIe siècle) : l’or y est traité de façon sculpturale et finement ciselé ; un pendant en jade incrusté d’or au nom de Shah Jahan, daté de 1047 (1637-38) ; probablement la plus ancienne poignée de dague sculptée en tête de cheval connue (env. 1590-1605), toute en cristal de roche incrusté d’or, de rubis et d’émeraudes en un motif de fleurs et d’oiseaux et une exquise coupe de cristal incrusté et serti de pierres précieuses, dans laquelle on peut voir, en regardant à l’intérieur, sous les montures extérieures les plus larges, des visages peints dans le style iranien, et sous les montures les plus petites, des plumes de martin-pêcheur d’une brillante couleur turquoise.
Pendentif avec portrait en camée de l’empereur Shah Jahan, or, rubis, camée, argent, Inde, empire moghol, vers 1680 pour la face, Deccan, XIXe siècle pour le revers, Koweit, collection al-Sabah, inv. LNS 43 J © the al-Sabah Collection / Edward Owen |
3 - Métaux précieux martelés en relief
Depuis l’antiquité, l'homme a décelé et exploité la nature hautement contrôlable des métaux nobles, notamment l’or et l’argent. Les doubles qualités de malléabilité et de ductilité leur donnent un potentiel exceptionnel d'adaptation plastique et de fixation des formes ainsi créées. Une des principales illustrations est le relief décoratif obtenu par martelage ou autre pression effectuée à température ambiante. La qualité remarquable et la finesse du travail de ces métaux précieux montrent bien qu'il compte parmi les expressions les plus caractéristiques de l'art indien. Peuvent être citées comme pièces maîtresses de cette section une coupe recouverte d’or, datant de la fin du XVIe ou du début du XVIIe siècle, ornée d’arbres, de fleurs et d’oiseaux. Cette superbe décoration révèle la présence en Inde de courants artistiques venus de Chine, d’Iran (au XVe siècle) et d’Europe (au XVIe siècle). On peut également signaler un réservoir huqqa en or couvert de motifs floraux et de feuillages d’une étonnante inventivité, sculptés avec une grande sensibilité qui, bien que dans un style nettement différent, partage les mêmes ascendances artistiques que la coupe précédemment décrite. Le corpus connu d’œuvres indiennes en métaux nobles martelés a été d’ordinaire attribué par déduction, sur la base de pièces d’époques plus tardives issues de telle ou telle province : le chercheur est confronté, de manière répétée, à des paradoxes et à des contradictions apparentes. Les deux pièces en or citées ci-dessus, ainsi que d’autres œuvres exposées dans cette section, et le rapprochement par similitudes historiques devraient permettre de clarifier, entre autres choses, quelques-unes des relations mystérieuses et déroutantes observables entre ce type d’œuvres issues de régions très éloignées les unes des autres.
4 - Joyaux au revers d'or gravé
L’extraordinaire renommée des bijoux indiens résulte en grande partie de la décoration, délicate et complexe, souvent réalisée de manière magistrale sur le revers des pièces, qu’une opinion répandue veut presque toujours orné d’émaux. Est montré ici un autre type majeur de décoration du revers, où l’or est gravé avec élégance : il constitue un phénomène relativement rare dans le matériel existant, et plusieurs de ces pièces sont les uniques représentantes d’école d’art floral gravé d’une très grande qualité. Cette technique est généralement accomplie avec l'aide de ciseaux spéciaux, "des graveurs". Bien que l'émaillage, par exemple, soit nettement mieux connu et plus amplement représenté dans la décoration des revers des pièces, les exemples présentés ici démontrent que la gravure était pratiquée à un très haut niveau dans l'industrie de la joaillerie indienne. Bien que rare cette pratique se retrouve dans d'autres bijoux islamiques, notamment dans ceux de Grenade, du XIVe au XVe siècles, le dernier avant-poste de la présence islamique en Espagne.
5 - Gemmes sur fond d'or à motif floral
Cette section rassemblent les pièces d’un groupe particulier, exceptionnellement important dans le corpus de la joaillerie moghole. Les plus caractéristiques et les plus belles peuvent en effet être liées, d'une façon certaine, aux ateliers royaux pendant la période d’apogée de l'art moghol (première moitié du XVIIe siècle). Des représentations dans des miniatures, les caractéristiques des pièces elles-mêmes et d'autres indices indiquent que ces pièces exceptionnelles ont été produites durant une période courte, peut-être une génération, de 1600 à 1635-1640 environ, bien qu’elles aient sporadiquement inspiré des imitations par la suite. Le trait le plus caractéristique de ces pièces tient dans la richesse du fond d’or des objets finement ciselés et gravés de motifs floraux, dans lesquels sont serties à plat des pierres précieuses. La collection al-Sabah possède un nombre important des pièces connues appartenant à ce groupe, dont les plus fameuses sont la mondialement célèbre dague aux rubis (présentée dans de nombreuses expositions, notamment India ! au Metropolitan Museum en 1985) et la partie centrale d’un bracelet de haut de bras (bazuband), inconnu auparavant et recouvert de façon unique de scènes figuratives hindoues exécutées en or et gemmes taillées. Du fait du très solide positionnement spatio-temporel de ce groupe, toute une série de caractéristiques trouvées sur diverses pièces y appartenant sont d’une immense valeur pour la datation et la localisation d’un bien plus grand nombre d’objets, apportant souvent des éléments de confirmation d’attributions antérieures, face à une tendance traditionnelle des historiens d’art à un conservatisme excessif dans la datation d’un tel matériel.
6 - L'évolution de l'art de l'émail
L'utilisation somptueuse de l'émaillage est une des caractéristiques les plus marquantes de la joaillerie indienne pendant la période moghole et ultérieurement (XVIe-XIXe siècles). Pourtant, ni l'Inde ni les pays avoisinants (en particulier l'Afghanistan et l'Iran) n'avait des traditions préexistantes dans cet art, introduit, comme d'autres techniques très sophistiquées, dans le sous-continent indien par des Européens au XVIe siècle. Un nombre considérable de joailliers européens étaient en effet employés à cette époque en Inde et ils y ont apporté leurs traditions et techniques. La joaillerie de la période moghole et les pièces émaillées en particulier démontrent l'adaptabilité, la maîtrise et l'inventivité des joailliers indiens, qui ont crée toute une gamme somptueuse et originale de types d’émaillage, ainsi que des styles peu connus jusqu'à présent. La section 6 donne l’occasion au visiteur de se représenter l’éventail et la qualité des réalisations. Loin d’être réduits comme on le pense souvent au style dit Jaïpur, avec son fond blanc et ses minuscules motifs majoritairement rouges et verts transparents, les émaux indiens témoignent, particulièrement durant le premier siècle après l’introduction de cet art européen, d’une large variété de styles et de palettes. Les pièces remarquables abondent dans cette section, couvrant des objets aussi divers que l’unique bague ancienne deccani ou moghole, de forme spécifiquement indienne mais de conception et de couleurs typiquement européennes, le majestueux anneau stabilisateur d’un réservoir circulaire huqqa (également présenté dans l’exposition India !), largement considéré comme l’une des plus belles pièces de l’émaillage indien connues jusqu’à présent ou l’épée royale hyderabadi ornée d’or et d’émail, datée de 1213 (1798/99). Parmi les surprises en matière d’histoire de l’art figurent l’isolation et la présentation, à travers cinq exemples, d’un groupe auparavant non reconnu d’émaux du XVIIe d’une palette de couleurs et de dessins uniques. Ces objets, probablement produits dans le Deccan, ont de fortes connections avec l’Italie, et l’exposition s’attache à démontrer la très large influence qu’ils ont exercé par la suite sur l’école d’émaillage de Lucknow, bien connue des connaisseurs depuis le XIXe siècle.
7 - Acier enrichi d'or
Un des types les plus caractéristiques et connus de l'art “oriental” est celui de l'ornementation des armes et des armures par incrustation ou application d’or, selon la technique habituellement appelée "la damasquinure". Ce terme vient du nom Damas, la capitale de la Syrie et l’une des plus grandes cités du monde antique et médiéval. "L'acier Damas" (ou damassé), où des moirures apparaissent à la surface de l’acier, tire son nom de la même source, mais représente une technique entièrement différente. Pour éviter toute confusion, les techniques désignées sous le nom imprécis de ‘damasquinure’, sont ici mentionnés soit comme "application d'or" ou "incrustation d'or" suivant la méthode employée. Pour de semblables raisons, le terme "Jawhar" (c'est-à-dire '[motif] intégral', faisant allusion au 'joyau', l'autre sens du mot Jawhar) est utilisé pour le type d'acier appelé "Damas". Ces deux techniques (application/incrustation d'or, et Jawhar) sont représentées dans cette section – non seulement sur des lames d'acier aux motifs d'une finesse extrême, mais aussi sur des poignées de dague katar et d'épées, ainsi que sur une variété d'objets, tels qu’une poire à poudre et un repose-mousquet à décor d'or incrusté ou appliqué d'une grande précision technique.
8 - Merveilles sculptées
L’Inde est célèbre à juste titre pour sa longue et distinguée tradition de sculpture et cette forte sensibilité pour l'expression plastique s’y répand dans tous les arts. Les objets de cette section montrent à quel point ces matériaux précieux sont l’incarnation totale de l’impulsion donnée à la sculpture à cette période. Les pièces illustrent en effet les catégories les plus évidentes (comme des dagues et couteaux au manche de jade sculpté en forme de têtes d’animaux) mais aussi les plus abstractives, dans lesquelles la forme de récipients souvent très simples se fait célébration de la sensibilité de l’artiste et de son besoin de s’exprimer à travers des formes en trois dimensions. Elle présente également un éventail complet d’autres types d’objets, dont deux bagues du début du XVIIe siècle absolument uniques, à la fois minuscules et monumentales, surmontées de deux oiseaux soigneusement élaborés (l’un d’eux fait la révérence en plus de tourner sur sa base), et un étendard en forme de poisson d’argent, finement modelé et gravé, aux yeux irisés de cristal de roche, surmonté d’un croissant.
Pièce centrale (collier ou bracelet de haut de bras - Bazuband), émeraude, Inde, empire moghol ou Deccan, fin XVIe - début XVIIe siècle, Koweit, collection al-Sabah, inv. LNS 2224 J © the al-Sabah Collection / Bruce M. White |
9 - Ornements taillés en relief
Complétant la section précédente, les pièces exposées ici présentent les ornements taillés en reliefs dans les pierres dures et précieuses telles que le jade, l’agate, le cristal de roche ou l’émeraude. Figurent notamment certains des plus beaux exemples au monde, la plupart taillés selon des motifs végétaux ornant des objets de jade (récipients, manches, éléments de joaillerie, etc.) et de grandes émeraudes (comme un chapelet, des pendentifs en forme de goutte, des pièces centrales de bracelet de haut de bras, et ainsi de suite). Les artistes indiens ne connaissant pas de rivaux pour la taille de pierres précieuses et semi-précieuses, une telle représentation de premier choix ne pourra se retrouver dans aucune autre collection. Une série de neuf émeraudes (en relation avec deux autres, perdues lors de l’invasion du Koweït en 1990, mais présentées dans le catalogue), de 17 à 235 carats, démontre la palette des expressions artistiques que l’on trouve dans la taille en surface des pierres précieuses. Ces dernières, en un nombre et selon une dispersion géographique surprenants, avaient fait le trajet depuis la Colombie jusqu’en Inde, dont le niveau d’exigence et la richesse avaient fait le premier marché de gemmes au monde. Cette section présente ce qui est peut-être le seul (dans l’exposition) jade indien taillé en relief postérieur à l’époque de Shah Jahan (1080/1669-70) : une bague-sceau réalisée pour un officier de l’empereur Aurangzeb. Il faut aussi mentionner un pendentif, serti d’un camée en agate, portrait de l’empereur Shah Jahan, sans doute le plus bel exemple existant de l’une des classes les plus rares d’objets princiers indiens.
10 - Sertissage de gemmes taillés en relief
Comme la section 4, cette partie regroupe un très petit ensemble d’objets, dont le trait commun est le sertissage des gemmes taillées en relief, c’est-à-dire la forme spécifique donnée à chaque pierre afin de permettre un certain agencement sur l’objet. Bien qu'un certain nombre de pièces de l’exposition soient incrustées de pierres taillées en relief, la petite sélection présentée dans cette section se distingue par la qualité et le nombre de gemmes taillées en relief qui donnent un caractère particulier à l’objet : une série de quatre pièces, serties de pierres précieuses taillées individuellement en forme de feuilles, de pétales de fleur ou d’animaux ; une dague katar dont la partie supérieures des barres latérales est sertie de rubis dont la taille raffinée forme des lions et des masques de félins. L'une des pièces exceptionnelles de la collection al-Sabah, et une des gloires de la joaillerie de la période moghole, est la poignée de canne se terminant par une tête de dragon à la puissance surprenante et déroutante du fait de sa férocité et de son sourire légèrement ironique : la crête est taillée en saillie dans un rubis d’une qualité incomparable, les joues serties de pierres, le nez et les sourcils également réalisés à partir de rubis de la plus belle eau.
11 - Formes remarquables de gemmes
Les gemmes seules réunies dans cette section mettent en lumière les différentes formes selon lesquelles elles ont été façonnées. Il y avait en Asie occidentale et en Inde, une approche totalement différente de la taille des pierres précieuses de celle adoptée en Europe. Plutôt que de réduire les pierres pour obtenir une forme préconçue, les lapidaires et les maîtres ont préféré libérer leur beauté en produisant des formes plaisantes et faciles à porter, tout en gardant le plus possible de matière. C'est cette approche qui a donné naissance à l'affirmation selon laquelle, "En Orient, les lapidaires polissent seulement les pierres sur lesquelles ils travaillent". Sont notamment exposés des diamants d’une importance historique, dont deux ont été taillés en forme d’amulettes (taviz, ta’widha), très populaires à l’époque médiévale (en cristal de roche, cornaline, etc.), une dague au manche entièrement formé de trois énormes émeraudes (probablement de la fin du XVIe ou du début du XVIIe siècle), et deux coupes miniatures du XVIe siècle, taillée chacune dans une seule gemme (l’une en grenat étoilé, l’autre en émeraude).
12 - Gemmes gravées d'inscription royales
La gravure d’inscriptions royales sur la surface de gemmes d’importance est une forme majeure de l’art moghol, particulièrement caractéristique de celui-ci. Ces inscriptions sont exécutées avec une pointe de diamant, le plus souvent sur des spinelles. Cette pierre a une signification spéciale pour les Moghols, à cause, entre autres raisons, de son association avec leurs ancêtres Timurides, qui gouvernaient en Iran et en Asie centrale. Le spinelle, d'abord connu sous le nom de "rubis balais" (de son origine du nord de l'Afghanistan, dans la province de Badakhshan, ainsi appelés "Badakhshi", et alternativement "Balakshi" d’où "balasci" et "balais"), était la seule grande pierre rouge vraiment transparente à l’exception du grenat, si sombre qu’il ne déploie ses gloires que sous une lumière très forte. Les spinelles gravés sont ensuite montés avec de grandes perles et d’autres gemmes pour former des colliers, des ornements de turban, des bazubands, etc. Outre la beauté des pierres et de la calligraphie, ces inscriptions constituent également des documents historiques de premier plan : elles peuvent en effet toujours être datées à l’intérieur d’une certaine période puisqu’elles portent souvent des dates spécifiques, notamment l’année du règne ou de l’Egire. La collection al-Sabah conserve le plus grand nombre au monde de spinelles portant des inscriptions royales, après le Trésor National des Joyaux d’Iran (le Trésor National des Joyaux d’Iran, c’est-à-dire les anciens joyaux de la couronne). Ces deux collections conservent approximativement les trois-quarts des exemples connus de ce type de gemmes à inscriptions royales. Cette prépondérance numérique (vingt-et-un spinelles gravés d’inscriptions royales sont présentés dans cette exposition, auxquels s’ajoute un autre dans le catalogue, perdu lors de l’invasion irakienne) est pratiquement éclipsée par la valeur de certaines pierres en elles-mêmes. La gemme gravée la plus remarquable (il s’agit de l’un des plus importants objets islamiques et indiens au monde) est un spinelle de 249,3 carats portant six inscriptions royales, la plus ancienne ayant été gravée entre 1447 et 1449 : outre celui de trois empereurs moghols y apparaissent, fait unique, le nom du Timuride Ulugh Beg et celui d’un souverain safavide (Shah Abbas Ier). Cette gemme est célèbre dans l’histoire moghole depuis ce jour de 1621 où elle fut présentée à Jahangir par les ambassadeurs de Shah Abbas le Grand d’Iran (dont le nom est inscrit sur la pierre avec la date 1026/1617). Cet événement, ainsi que la présentation quelques mois plus tard de cette gemme par Jahangir à son fils Shah Jahan, est signalée dans les propres Mémoires de l’empereur Jahangir. Les historiens contemporains ont établi que ce spinelle était inséré dans une position centrale dans le légendaire 'trône du Paon' de Shah Jahan. Il s’agit sans doute du seul objet spécifique identifiable montré dans une miniature de l’époque : dans une peinture du manuscrit de Padshahnama conservé à Windsor Castle, on le voit, monté sur un ornement de turban et présenté par Jahangir à son fils. D’autres types de gemmes gravées d’inscriptions sont présentées dans la section, parmi lesquelles l’émeraude de 85,6 carats dont la face est entièrement couverte d’une inscription de sept lignes, dans une belle écriture naskhi, reprenant l’intégralité du Verset du Trône, tiré du Coran (s’y ajoute dans le catalogue une autre pièce sublime, un hexagone tabulaire de 73 carats de la plus belle couleur émeraude, également perdue lors de l’invasion du Koweït en 1990).
13 – Les pièces d'exception
La treizième et dernière section regroupe tous les styles et techniques illustrés dans les sections précédentes et rassemble les pièces d’exception, qui témoignent du génie et de l’inventivité des plus grands artistes de l’époque, marquée par une vision somptueuse de la joaillerie, tout à la fois sculpturale et pleine d’un sens de la couleur proche de la peinture. Leur caractéristique commune est une virtuosité sans égale qui a permis de composer à partir de matériaux en soi très achevés une véritable symphonie artistique, une unité vibrante et éternellement fascinante. En effet, alors que la somptuosité de chacun de ces éléments autant que leur indéniable valeur intrinsèque étaient susceptibles d’inhiber l’élan créateur des artistes, ces derniers sont au contraire parvenus à en exalter la magnificence par leur maîtrise. Ces œuvres (qui peuvent à première vue paraître surchargées de pierres précieuses) méritent une attention particulière, seul moyen d’y découvrir des chefs-d’œuvre presque cachés et d’apprécier la capacité de ces maîtres à subordonner ces matériaux à leur goût et à leur volonté artistiques.
Plat, or, rubis, émeraudes, Inde, empire moghol, 1er quart du XVIIe siècle, Koweit, collection al-Sabah, inv. LNS 1785 J © the al-Sabah Collection / Edward Owen
CONTEXTE HISTORIQUE
La domination islamique dans le sous-continent indien
Au VIIIe siècle de notre ère, à l’époque de la première dynastie caliphale des Ommeyades, les armées musulmanes réalisent d’importantes conquêtes dans la vallée de l’Indus, établissant des protectorats qui se constituent ensuite en principautés. Plusieurs de ces sites ont livré des pièces remarquables, qui synthétisent les idées artistiques islamiques et indiennes, montrant la créativité des artistes indiens capables d’adapter les influences les plus diverses pour créer de nouveaux styles. Au cours du premier tiers du XIe siècle, Mahmud de Ghazna (en Afghanistan) conquiert de larges territoires tout en poursuivant ses incursions annuelles en direction du sud-est. A la fin du XIe siècle et durant le XIIe siècle, la création d’une capitale très cultivée à Lahore contribue au développement général et durable du pouvoir et de la culture islamiques dans le sous-continent. Les Ghurides succèdent aux Ghaznévides en Afghanistan et au Penjab, et, à la fin du XIIe - début du XIIIe siècle, établissent une domination musulmane unifiée sur la quasi totalité de l’Inde du Nord, Delhi inclus. Dès lors, une série de dynasties musulmanes règne sur le Sultanat de Delhi, chacune agrandissant généralement le territoire. Dans le Deccan, le Sultanat bahmanide (indépendant depuis le milieu du XIVe siècle) s’étend progressivement, jusqu’à couvrir, de la côte est à la côte ouest, le centre et le sud de l’Inde. Les royaumes qui lui succèdent (les Barid Shahis, les Adil Shahis, les Nizam Shahis, les Imad Shahis et les Qutb Shahis) sont contemporains des débuts de l’Empire moghol, fondé en 1526 lorsque Babur conquit Delhi.
LES EMPEREURS MOGHOLS
Babur (1526-1530)
Babur, l’un des nombreux princes à prétendre au contrôle du coeur des territoires de son arrière grand-père Timur, a pénétré plusieurs fois dans la capitale, Samarcande, mais n’a pas pu s’y maintenir. Il finit par tourner ses regards vers le sud et l’est, où il rencontre plus de succès. En 1526, 1527 et 1529, il bat successivement les armées des Lodi, souverains de Delhi, une coalition de chefs Rajput et d’Afghans de l’est de l’Inde. C’est ainsi que commence ce qui deviendra l’empire des Grands Moghols. La victoire de Dehli apporte d’immenses richesses et il importe de noter ici que le butin distribué par Babur comme marques d’estime inclus des objets de joaillerie telles des dagues, des épées et des ceintures. A l’image d’autres princes timurides, Babur s’intéresse profondément aux arts et aux sciences, et bien qu’il passe l’essentiel de sa vie en campagne, il laisse une œuvre d’une grande qualité littéraire. Egalement poète, Babur écrit principalement dans sa langue maternelle, le turc tchagatay, même s’il maîtrise le persan. Sa célèbre et vivante autobiographie, le Babur nama, raconte ses activités politiques et militaires ainsi que celles de la cour, mais décrit et analyse également les personnes, animaux, plantes, fruits, qui l’ont impressionné.
Humayun (1530-1540 puis 1555-1556)
Humayun a joué un rôle de premier plan dans les campagnes militaires de son père, qui ont conduit à la fondation de l’empire. En lui succédant, il poursuit pendant quelques années l’expansion territoriale et la consolidation du pouvoir moghol. Mais à partir de 1540, le contrôle de l’Hindoustan passe dans les mains du commandant afghan Sher Khan (Sher Shah Suri), après une série de revers au cours desquelles ses frères ont activement contribué à l’ébranler. Humayun se voit forcé de battre en retraite d’abord au Sind, puis en Afghanistan, et finalement d’accepter le statut d’exilé et de client du souverain d’Iran, Shah Tahmasp. Après un an en Iran, Humayun, aidé par les troupes persanes, entame un long combat pour reprendre son trône, une fois de plus entravé par ses frères, en particulier le prince Kamran. Au milieu de l’été 1555, il bat de manière décisive les forces de Sikander Shah Suri et reprend le trône de Delhi. Il meurt quelques mois plus tard des suites d’une chute dans l’escalier de sa bibliothèque. Humayun est un prince cultivé et son activité de mécène a contribué de façon importante à la formation de la 'synthèse' moghole en art, notamment parce qu’il attire à sa cour les grands peintres iraniens rencontrés lors de son exil. Il va sans dire que les arts de la joaillerie ont continué d’être activement développés sous son règne, comme cela a toujours été le cas en Inde et dans d’autres cours islamiques. Humayun est également connu pour son mécénat dans les domaines des mathématiques et de l’astronomie, poursuivant des traditions de la lignée des Timurides et, plus généralement, des princes islamiques.
Akbar (1556-1605)
Akbar est l’homme qu’il fallait à son temps et le véritable architecte de l’Empire moghol. Il a tout juste treize ans lorsque il accède au trône de cet empire naissant. Il mène, tout au long de son règne, une politique agressive d’expansion territoriale et de réformes administratives. A sa mort, l’empire est vaste et sécurisé, intégrant tout le sous-continent indien et l’est de l’Afghanistan, à l’exclusion des quatre sultanats restants du Deccan, l’extrême sud et une partie d’Orissa.
Le dynamisme physique d’Akbar égale ses capacités intellectuelles, son pragmatisme et son vif intérêt pour tous les domaines, y compris artistiques. Il est dans une large mesure personnellement responsable de la transformation des arts dans l’Empire moghol. La richesse de son Etat est telle qu’il n’y a pas de limite pratique à son ambitieux et perspicace mécénat et, étant donné les incalculables profondeurs de la tradition artistique en Inde, les conditions sont réunies pour les remarquables réalisations qui vont suivre. Une quantité d’informations considérable sur les établissements artistiques royaux à l’époque d’Akbar a été consignée par son ministre Abul Fazl Allami, notamment leur division en une vingtaine de départements, eux-mêmes subdivisés pour les disciplines variées des arts de la joaillerie. Ce système sera poursuivi, comme l’organisation administrative générale de l’Etat, par ses successeurs.
Jahangir (1605-1627)
Le règne de Jahangir est caractérisé par une stabilité et une paix relatives, malgré les inévitables intrigues et rebellions, incluant celle de son fils et successeur, Shah Jahan, qui fait écho à la propre rébellion de Jahangir à la fin du règne d’Akbar, son père. Durant la majeure partie de son règne, sa talentueuse et ambitieuse femme, Nur Jahan, exerce une grande influence sur les affaires de l’Etat. Perpétuant la tradition de mécénat de la famille, Jahangir préside à une phase particulièrement riche du développement artistique de l’Inde, durant laquelle les synthèses les plus abouties et les plus parfaites de l’art indien sont produites. Ses Mémoires sont une source inhabituellement riche d’informations sur les arts de la joaillerie et sa profonde appréciation de l’art en général, tout comme sur l’extrême diversité de ses centres d’intérêt, les curiosités et événements de son temps.
Shah Jahan (1628-1657)
Shah Jahan poursuit la politique de tolérance, sage administration, paix et prospérité générales de ses deux prédécesseurs immédiats, même si apparaissent quelques signes de l’influence croissante des partis musulmans. Il s’engage pleinement dans la conduite des affaires de l’empire et agrandi encore le territoire par des conquêtes dans le Deccan, notamment l’annexion d’Ahmadnagar et l’imposition d’un tribut annuel à la dynastie des Qutb Shahis de Golconde/Hyderabad, qui peuvent être vues comme la suite de ses campagnes dans le Deccan lorsqu’il était encore prince. Il passe les huit dernières années de sa vie en détention dans un palais, suite à une maladie qui sème la dispute entre ses quatre fils, conduisant l’un d’entre eux, Aurangzeb, à s’emparer du trône. Shah Jahan est le légendaire bâtisseur du Taj Mahal, mausolée monumental élevé pour son épouse bien-aimée, Mumtaz Mahal, et célébré dans le monde entier. Il a été activement impliqué dans l’élaboration de ce chef-d’œuvre, ainsi que dans celle d’autres projets architecturaux. Et bien sûr, comme ses aïeux, il est un mécène averti pour tous les arts. En effet, son père Jahangir et d’autres sources, comme les voyageurs européens, rapportent qu’il pratique lui-même la joaillerie et qu’il est reconnu comme un grand expert en matière de gemmes.
Aurangzeb (1658-1707)
Aurangzeb passe l’essentiel de sa vie en campagnes militaires, depuis les guerres de succession contre ses frères à l’annexion des sultanats de Bijapur et de Golconde/Hyderabad, en passant par les combats contre différentes rébellions dangereuses, telle celle des Marathes dans le Deccan. Son manque évident de prudence mène, entre autres choses, au rétablissement de la jizya (impôt frappant les non-musulmans et particulièrement les Hindous), à l’épuisement du trésor du fait de guerres largement stériles, de sa feinte ignorance quant à la corruption et l’inconduite de ses officiers supérieurs. Sa mort marque la fin véritable de l’empire des Grands Moghols, les empereurs qui lui succèdent présidant à l’affaiblissement et à la réduction du pouvoir central au profit des gouverneurs régionaux. L’époque d’Aurangzeb est reconnue comme un moment de déclin artistique, en parallèle de la situation politique. Un passage en revue de toutes les disciplines artistiques montre une perte marquée d’inventivité, de qualité et de grandeur ; une situation certainement attribuable au manque général d’intérêt de ce souverain pour le mécénat artistique, lui-même dû à son orthodoxie religieuse. Même en ce qui concerne les arts de la joaillerie, on peut observer un amoindrissement de l’effervescence artistique et de l’innovation. Cependant, l’ancienne et ininterrompue pratique du mécénat auprès des joailliers se poursuit, comme un membre indépendant de la tradition, des types tribaux et villageois jusqu’à certains centres (comme Hyderabad et Lucknow), où les styles généralement reconnus comme 'moghols' jouissent du mécénat royal jusqu’au XIXe siècle.
Le déclin des Moghols
De 1707 à 1858, dix neuf souverains moghols se succèdent sur le trône, dont quatre pour la seule année 1719. Le plus long de ces règnes est celui de Muhammad Shah (1719-1748), durant lequel Delhi, et le trésor impérial, est mise à sac par les troupes du souverain iranien, Nadir Shah, en 1739 – événement symptomatique de l’état de déclin de l’Empire moghol. Cet 'empire' continue cependant de jouir de certains privilèges de suzeraineté de nom, comme d’accorder les documents de légitimité aux différents gouverneurs régionaux, jusqu’à son extinction officielle en 1857-58.
LES SULTANATS DU DECCAN
Depuis le milieu du XIVe siècle environ, le Sultanat bahmanide gouverne la quasi-totalité du Deccan (Inde du centre sud), indépendamment du Sultanat de Delhi au nord. Mais à la fin du XVe siècle, il éclate en cinq grands royaumes : les Imad Shahis de Berar ; les Barid Shahis de Bidar ; les Adil Shahis de Bijapur ; les Nizam Shahis d’Ahmadnagar et les Qutb Shahis de Golconde/Hyderabad. Les fondateurs de ces dynasties sont tous des officiers supérieurs ou des ministres au service des Bahmanides, ayant l’un après l’autre déclaré leur indépendance vis-à-vis de l’Etat bahmanide en voie de désagrégation. Bien que moins célèbres que les Moghols du nord de l’Inde, beaucoup de ces sultans sont connus pour être des souverains très cultivés et de généreux mécènes des arts. Il est intéressant de noter que du fait de leur position géographique, plusieurs de ces royaumes sont mieux placés, au XVIe siècle, pour bénéficier des apports technologiques, culturels et artistiques venus d’Europe. Par ailleurs, l’étendue et l’importance de ces cours dans l’assimilation des nouvelles techniques et des styles artistiques, qui ont tellement stimulé les développements indiens à cette époque, sont encore loin d’être bien comprises. L’exposition a permis d’attribuer au Deccan de nombreux objets, précédemment qualifiés 'moghol'. Le temps aidant et les recherches se poursuivant, une certitude et une précision croissantes en la matière devrait être possible.
Cette exposition est organisée par La Collection al-Sabah, Musée national du Koweit, en collaboration avec le musée du Louvre. Elle est rendue possible grâce au mécénat de Kuwait Finance House, Mobile Telecommunications, Al-Wataniya et Kuwait Investment Co.. |